22/05/2020

Fumer au travail, quelles sont les pratiques dans les entreprises ?

Selon l'OMS, la France compte près de 16 millions de fumeurs (sur près de 67 millions de Français). Chaque année depuis 1988, le 31 mai est la journée mondiale sans tabac. Dans le monde professionnel, nombreux sont les salariés à apprécier les pauses cigarettes seuls ou entre collègues. Mais peut-on vraiment fumer au travail ? Découvrez ce que dit la loi française à ce sujet.

Fumer au travail : que dit la loi française ?

Parti d’une nécessité de santé publique, fumer au travail, a été encadré en entreprise par le Code de la santé publique. Il est interdit de fumer, depuis le 1er février 2007, dans tous les lieux fermés et couverts qui accueillent du public ou qui constituent des lieux de travail. Cette interdiction s’étend à tous les locaux affectés à l‘ensemble du personnel, salles de réunion, de formation mais aussi aux bureaux, même occupés par une seule personne. Si une personne fume dans un lieu interdit, elle est passible d’une amende forfaitaire de 68 €.

Le tabagisme passif est augmenté dans les espaces clos

Au-delà des conséquences du tabac sur la santé, des études ont démontré que le tabagisme passif serait particulièrement augmenté dans les espaces clos et confinés. Fumer au travail, dans un espace fermé comme un bureau, peut donc nuire à vos collègues. En effet, la fumée contient plus de 50 substances toxiques et nocives pour le fumeur mais également pour le non-fumeur qui respire la fumée émise. Selon Tabac info services, “au-delà de la gêne occasionnée, le tabagisme passif aggrave chez l’adulte des pathologies existantes et en crée de nouvelles. Si les risques demeurent certes moins importants que chez le fumeur actif, les conséquences pour la santé du non-fumeur sont réelles”.

Les conséquences du tabac au travail pour les employeurs

Pour les fumeurs, la cigarette donne l'impression d'être plus détendu et d’avoir plus d'énergie dans un moment difficile à passer. Au moment du café, avant ou entre deux réunions, elle est devenue indispensable. Cette pause partagée ou non avec d’autres collègues est un besoin souvent difficile à contrôler. En effet, la nicotine se fixe sur des récepteurs spécifiques situés dans la région du cerveau du fumeur qui contrôle le circuit de la récompense. Elle déclenche le fonctionnement d’une substance naturelle impliquée dans la modulation des comportements et des émotions : la dopamine. Une fois libérée, cette substance permet de ressentir des perceptions positives. Le fumeur va donc chercher à répéter ces sensations de plaisir apportées par la cigarette et perçues comme une récompense. Chez le fumeur, il est alors indispensable, pour combler ce manque de nicotine, de quitter son poste de travail et prendre l’air pour assouvir, ce qui est devenu une nécessité. Mais si une pause de 20 minutes par jour au bout de 6 heures de travail est obligatoire, la pause cigarette n’existe dans aucun texte législatif de manière officielle.

Des études sérieuses ont prouvé que fumer au travail peut coûter cher à une entreprise. La productivité chez les fumeurs serait réduite et ces derniers seraient plus enclins à être en arrêt maladie. Selon un sondage de l’Office français de prévention du tabagisme réalisé en 2009, 19% des fumeurs déclaraient un arrêt de travail au cours des 6 mois, contre 11,5% pour les non-fumeurs.

Erick Serre, Directeur Général de la société Allen Carr, qui propose une méthode pour arrêter de fumer aux particuliers et aux salariés, a évalué que pour 5 cigarettes fumées au travail, d'un temps de pause de 6 minutes par cigarette et de deux jours d'arrêt maladie par an en plus pour un fumeur, une entreprise peut perdre jusqu’à 3 109 euros par fumeur. Soit une somme considérable !

Si les non-fumeurs font également des pauses, le problème de l’addiction à la nicotine serait que les fumeurs soient obligés de s’arrêter lorsqu’ils ressentent une sensation de manque qui les empêche de se concentrer. Erick Serre précise qu’un fumeur au travail “ne fume pas pour se concentrer mais pour ne pas se laisser distraire par le manque de nicotine”.

Est-il autorisé de fumer la cigarette électronique au travail ?

La cigarette électronique ou e-cigarette, apparue en France à la fin des années 2000, est un dispositif électronique générant un aérosol destiné à être inhalé. Elle produit une vapeur ressemblant visuellement à la fumée produite par la combustion du tabac et peut contenir ou non de la nicotine.

La cigarette électronique ne produit pas les mêmes nuisances et elle est considérée comme moins gênante que la cigarette classique. D’ailleurs, il n’est pas rare de voir un de vos collègues sortir sa cigarette électronique et de fumer au travail ouvertement dans les locaux, voire l’open-space de votre entreprise.

Cependant, depuis le 1er octobre 2017, il est interdit par la loi de vapoter au bureau, mais les entreprises font souvent preuve d’une grande tolérance. Faute de recul suffisant, il n’a pas été encore prouvé de possibles risques pour la santé malgré la mise en garde de certains spécialistes. A savoir que l’employeur a une obligation de résultat pour la santé de ses salariés et qu'une personne vapotant dans un lieu public est passible d’une amende.

Certains environnements professionnels favorisent le tabac au travail

D’après une étude de la Direction de l'Animation de la recherche, des Études et des Statistiques (Dares), qui dépend du ministère du Travail, l’environnement professionnel inciterait les salariés à fumer au travail parfois plus facilement. En effet, ces travaux menés entre 2006 et 2010 font apparaître qu’il y aurait un lien entre l’activité professionnelle et la consommation de tabac. En 2006, 21 % des femmes et 27 % des hommes en activité fumaient quotidiennement sur leur lieu de travail. Sur les quatre années suivantes, lorsque se sont aggravées les contraintes physiques et l’insécurité dans l’emploi, la tendance a augmenté. Les études ont également démontré que les employés exposés aux risques psychosociaux ou à des conditions de travail difficiles seraient plus enclin à fumer.

Le tabac au travail est-il différents en fonction des CSP ?

Toujours selon l'étude de la Dares, la pénibilité et l'environnement de travail seraient en corrélation avec une consommation du tabac dans l'univers professionnel puisque 30% des salariés exposés à un environnement difficile fument contre 24% de leurs collègues plus sereins.

Dans le secteur du BTP, les ouvriers sont nombreux à fumer au travail, sur les chantiers. Les conditions climatiques, le port de charges lourdes, l'exposition au bruit et au risque sont autant de raisons qui les incitent à allumer une cigarette fréquemment. Quant aux femmes, plus leur travail s'avère physique et stressant, plus la consommation de tabac est importante.

Des dispositifs d'aides pour arrêter de fumer

Les pouvoirs publics redoublent d’efforts et des organismes tels que l’Assurance Maladie aident les personnes qui souhaitent arrêter de fumer en remboursant à hauteur de 65% les substituts nicotiniques comme les patchs, gommes ou pastilles. es autres dispositifs peuvent faire l’objet d’une prise en charge par une mutuelle. Ces substituts peuvent être prescrits par un médecin, une sage-femme ou autre praticien.

Certains centres de santé ont aussi mis en place des cellules d’accompagnement pour lutter contre les addictions comme le tabagisme. Diverses méthodes de sevrage tabagique comme l’hypnose, séduisent de plus en plus de fumeurs bien décidés à en finir avec la cigarette. Cette approche viserait à modifier le rapport du fumeur face au tabac en prenant appui sur ses croyances ou ses rituels.

Chaque année au mois de novembre, une opération national appelée "Mois Sans Tabac" incite les fumeurs à arrêter le tabac pendant 30 jours. Celles et ceux qui souhaitent se lancer dans cette aventure peuvent télécharger un kit en pharmacie ou en ligne. C'est une occasion idéale pour les fumeurs de prendre du recul face à leur consommation, la réduire, voire arrêter définitivement de fumer au travail et au quotidien sur le long terme.